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Diversité du pain

Du lucane au gendarme

Des ingrédients ordinaires pour une variété extraordinaire. Dans notre culture boulangère, la diversité est quasi sans limites et les créations sont le «pain quotidien» de nos boulangers. Voici un aperçu de l’assortiment Sutterbeck à Breitenbach.

Marlies Keck

Il suffit d’un peu de farine, d’eau, de sel et de levure pour faire un pain. Les types de farine, la maturation de la pâte et le temps de cuisson sont là pour varier les plaisirs, tout comme les noix ou les raisins. Outre les pains blancs, mi-blancs, bis ou complets à base de blé, de nombreux pains spéciaux qui utilisent des céréales comme l’épeautre, le seigle, etc. ou d’autres ingrédients (lait, fruits, graines, p. ex.) viennent d’ores et déjà compléter les classiques suisses. Sans compter toutes les spécialités de saison et régionales! Ainsi, la Suisse compte aujourd’hui près de 300 sortes de pain – tendance à la hausse grâce à des artisans toujours plus créatifs.


Pain clair ou foncé, saveur douce ou prononcée: il y en a pour tous les goûts à la boulangerie Sutterbeck. © Marlies Keck

Produit phare pour une alimentation saine

Mais qu’est-ce qui se cache derrière les nouvelles créations? Frédéric Sutter, qui a repris le commerce de ses parents en 2018, nous explique: «L’important est d’écouter les clients si l’on veut bien les servir. Cela nous réussit plutôt, puisque nous en sommes souvent déjà aux essais lorsque la demande pour un nouveau pain se fait sentir.» Avec le pain PlusMinus par exemple, la boulangerie dispose depuis longtemps d’un produit qui répond au besoin croissant des clients de prendre soin de leur santé. «Nos quatre sortes de pain PlusMinus contiennent de nombreuses protéines végétales et plus de 50 pour cent d’hydrates de carbone en moins qu’un pain traditionnel. Plus besoin de renoncer au pain du soir dans le cadre d’une alimentation low carb – le pain PlusMinus est là pour ça.»


Plus de protéines, moins d’hydrates de carbone: le pain PlusMinus convainc surtout les personnes soucieuses de leur alimentation. © Marlies Keck

Un petit goût de nostalgie

A lui seul, le nom du pain du ramoneur, Spazza Camino, suggère le produit. La croûte noire que l’on obtient grâce à une cuisson prolongée n’est pas son seul atout; la belle mie blanche et moelleuse y est aussi pour quelque chose. «Bien sûr, le visuel joue un rôle important,» nous confie Sutter. «Mais ses valeurs intrinsèques comptent aussi.» Le Spazza Camino est composé de farine bise avec une forte teneur en seigle, de levain naturel, d’un peu de levure et de sel. «C’est la longue fermentation de près de 20 heures qui lui donne cet arôme délicat. Il nous a fallu plus d’un an pour le mettre au point, ce qui est plutôt long pour une nouvelle création.» Et pourquoi un nom italien? «Son goût me rappelle un joli souvenir d’enfance, quand je passais mes vacances dans le nord de l’Italie. On y trouvait exactement ce genre de pain. Les souvenirs sont vecteurs d’émotions, ce que je retrouve dans le Spazza Camino.»


Un hommage aux vacances dans le nord de l’Italie: le Spazza Camino ravive des souvenirs d’enfance. © Sutterbeck

Rappel des origines

Même si Frédéric Sutter fait un clin d’œil à l’Italie avec son Spazza Camino, il est et reste un «Hirzenkäfer» (lucane cerf-volant) du «Schwarzbubenland». C’est ainsi qu’on appelle pour plaisanter les habitants de Breitenbach, chef-lieu du district de Thierstein, surtout pendant le carnaval. «Il est donc tout naturel que nous proposions un pain Hirzenkäfer et un pain Schwarzbuben dans notre assortiment,» s’amuse Sutter. «Ce sont tous les deux des pains sombres, à la saveur intense; le Hirzenkäfer grâce à la farine maltée et le Schwarzbuben pour sa forte teneur en farine de seigle. De plus, ils restent frais très longtemps grâce à une maturation de 18 heures». Par manque de sources, nous n’avons malheureusement pas réussi à décrypter le rapport entre le pain ou les habitants du village et le coléoptère aux mandibules imposantes. Par contre, vous trouverez ici la recette du Hirzenkäferbrot!


Le lucane cerf-volant ou Hirschkäfer en allemand, donne son nom à ce pain au malt particulièrement goûteux. © Sutterbeck

Produits régionaux

Frédéric Sutter utilise autant que possible des produits régionaux. Les céréales qui entrent dans la composition de sa farine issue du moulin Knecht proviennent des champs qui s’étendent de Laufen à Augst. Idem pour la baguette au gendarme, dont la saucisse provient de la boucherie Schaad à Flüh. «Le gendarme épicé et aromatique est très connu et délicieux avec cette baguette.» Ce pain est particulièrement apprécié par les jeunes qui font la fête et ont un petit creux après leur virée nocturne. «Il passe aussi à merveille dans un apéritif raffiné. Il suffit de le couper en morceaux, de le toaster, et c’est prêt.»


La baguette au gendarme met en valeur le goût corsé du gendarme. © Sutterbeck

Vive la fermentation longue!

La digestion est un aspect important à prendre en compte dans les nouvelles créations. «Moi-même, je ne suis pas épargné par les allergies», avoue Frédéric Sutter. «Certes, je ne suis pas concerné par la maladie cœliaque, mais cette problématique me tient à cœur et cela me rend plus crédible auprès de mes clients.» Une longue fermentation permet aux bactéries de la levure d’agir plus longtemps, ce qui réduit la teneur en hydrates de carbone – les fameux FODMAP -, lesquels sont difficilement voire pas du tout assimilés par le côlon. S’ils arrivent non digérés dans le côlon, ils peuvent provoquer des problèmes gastriques. «Quasiment tous nos pains reposent sur le principe de la fermentation longue», souligne Sutter. «Si nous manquons de place, nous utilisons une prépâte. Et comme nous avons également des clients qui sont intolérants à la levure, nous leur proposons une réelle alternative avec le Helvetia.» Le levain est composé de farine bise et la prépâte de gruau de seigle. Quant à la pâte principale, elle contient une bonne quantité de flocons de pommes de terre qui, en retenant l’eau, confèrent tout son fondant au pain.


L’Helvetia est un pain à base de flocons de pommes de terre particulièrement digeste. © Sutterbeck

Quoi de prévu pour la suite? Frédéric Sutter: «Nous nous penchons actuellement sur les valeurs nutritives de nos pains. Nous souhaiterions qu’ils soient tous aussi nutritifs qu’un pain complet. Je n’en dirai pas plus!» Nous avons hâte de connaître la suite!