Comment les grands chefs mettent-ils le pain en valeur?
Quelques restaurateurs innovants expliquent comment épater ses invités avec le pain.
Il suffirait de peu de choses pour que le pain occupe la place qu’il mérite dans la restauration. Et qui dit produits boulangers de qualité, dit clients satisfaits. Des clients qui se souviendront longtemps de la peine que le restaurateur s’est donné pour soigner les détails. En réalité, il n’y a guère de produit, parmi l’immense offre existante, qui reçoive aussi peu d’attention que le fameux mélange de farine, eau, sel et levure. Quelques tranches sèches dans une corbeille, achetées chez un fournisseur bon marché et servies du matin au soir. Un à-côté obligatoire, relégué au même rang que les serviettes, les fourchettes et les couteaux.
Mais qu’est-ce que les clients veulent de plus? Répondent de nombreux restaurateurs face à cette situation souvent peu satisfaisante. Ils devraient s’estimer heureux de recevoir de la nourriture gratuitement. Si le pain est trop bon, les gens en mangent beaucoup et commandent moins de plats, ce qui réduit les bénéfices du restaurant. Cet état d’esprit est pourtant loin d’être infondé. Personne ne s’attend à ce que le client se voit proposer une superbe sélection de pains dès son arrivée à table, sans oublier le beurre, l’huile et les amuse-bouches. Ni que ceux qui souhaitent seulement commander une petite collation puissent s’en mettre plein estomac!
Foto: City Foodsters / Flickr, CC BY 2.0
Trouver de nouvelles idées, sans exagérer sur la diversité
Les restaurateurs devraient parfois se donner plus un peu plus de peine pour convaincre de leur bonne volonté et de leur attachement aux produits de qualité. Le pain ne doit pas nécessairement être acheté chez le grossiste. Il peut aussi provenir d’une boulangerie locale qui fait du bon travail. Avec un ravitaillement quotidien bien sûr, de préférence avant le service du midi et du soir. Quelques spécialités saisonnières sont toujours les bienvenues. Mentionner le nom du boulanger est une idée astucieuse, il pourra lui aussi se référer au bistrot qui mise sur ses produits. Un peu plus de deux maigres tranches par personne seraient souhaitables, sans pour autant aller jusqu’à sept variétés de pain différentes comme on trouve dans certains restaurants qui visent les bons avis et les étoiles ou se battent pour les préserver. «La tendance est plutôt à en faire moins», explique Andy Vorbusch, chef pâtissier du nouveau restaurant «Memories» au Quellenhof à Bad Ragaz. Pas besoin d’une montagne de petits pains vite desséchés. Quelques tranches d’un gros pain font tout aussi bien l’affaire. Une seule variété peut suffire, mais elle doit être inspirante. C’est le cas chez «Memories». Depuis des mois, Vorbusch et son équipe travaillent sur la qualité de l’offre, la mise au point du levain et l’expérimentation de différentes farines et durées de fermentation, qui est de 18 heures aujourd’hui! Le restaurant «Silver» à Vals mise quant à lui sur un pain à la pomme de terre, servi avec des pelures de pomme de terre bien grillées. Effet garanti! Andreas Caminada du «Château Schauenstein» a même ouvert sa propre boulangerie.
Il y a des meilleures options… (Photo: Paul Istoan / Flickr CC BY-NC 2.0)
Le service personnalisé fait la différence – et aussi la température
A propos de «faire de l’effet», une autre façon de marquer les esprits consiste à donner des explications sur le pain et à le couper directement à table, devant ses invités. C’est ce que font Andy Vorbusch et ses collègues au «Memories», tout en expliquant la philosophie du produit, et les convives en sont ravis. «Certains clients demandent s’ils peuvent acheter du pain pour le ramener à la maison », explique le restaurateur. C’est parfois le cas au restaurant «Steirereck» à Vienne. Ce restaurant doublement étoilé mise sur l’opulence, avec un chariot à pain arborant près de 30 variétés de pain, depuis le pain fourré au boudin jusqu’au pain noir à la farine de malt. Tout n’est pas fait maison mais personne ne l’exige. Les boulangers dignes de ce nom sont de toute façon plus qualifiés que la plupart des cuisiniers pour faire du bon pain. Il n’est certes pas sorcier de faire cuire un pain dans un pot de fleur et de le servir encore brûlant sur la table. Mais encore faut-il y penser. Ne serait-ce que pour l’odeur! Soit dit en passant, au «Le Gourmet» à Heidelberg, le pain n’arrive pas tout de suite, mais seulement après les amuse-bouches et c’est un plat en soi. Il est servi tout chaud avec des copeaux de beurre glacé. Nul doute qu’au moins la moitié des invités garderont à l’esprit cet étonnant contraste de température. Et pour ceux qui veulent aller encore plus loin: au restaurant «Intense» dans le Palatinat allemand, on ne sert pas de pain au menu, mais il arrive avec la note à la fin de repas, pour le réchauffer au petit-déjeuner. Rien de tel pour se faire une bonne publicité.